Le président du plus ancien regroupement d’entrepreneurs privés était hier l’invité du Forum de DK News. Il a intervenu sur de nombreux sujets qui recouvrent la situation économique actuelle, les conséquences de la non-diversification des investissements hors hydrocarbures, s’inquiétant de la façon dont le crédit à la consommation sera mis en œuvre, de l’endettement prévisible du contractant, etc.
Critique, le président de la CGEOA est resté dans les limites qui peuvent être permises en constatant que la chute des prix des hydrocarbures était prévisible, qu’il fallait, le sachant, investir dans l’agriculture, le tourisme et les NTIC : «Notre organisation va s’investir dans le soutien des jeunes diplômés algériens créatifs et inventeurs. Il y en a comme celui qui a utilisé un moteur de «Coccinelle» pour construire un petit aéronef utilisable dans l’épandage d’engrais.»
Gisements d’emplois et patrimoine économique national. L’orateur est convaincu que les inventeurs algériens peuvent contribuer largement à la création de richesses et de relance de l’emploi.
Un autre gisement d’emplois et de technologie est la fabrication de pièces détachées automobiles, «au lieu de les acheter chez le fabricant.» Il déplore, au passage, le contrôle de SOVAC par Volkswagen en s’écriant : «SOVAC n’est plus algérien». Ce qui, par glissement, l’amène à parler de l’ouverture du capital des entreprises publiques au privé national : «Cette mesure est des plus dangereuses pour le secteur ...
Crédits
«Dans l’état actuel de ce projet, la CGEOA est contre. D’abord pour une raison bien simple : Combien va consacrer un contractant ayant un salaire de 30 000DA au remboursement de sa dette ? 10 000 ? Il sera déjà dans la spirale de l’endettement et des conséquences que cela peut avoir… L’autre aspect est que le choix des entreprises éligibles à ce crédit en exclut d’autres qui sont sur le même créneau. Ceci est de la concurrence déloyale !»
Toujours au titre du crédit, Habib Yousfi constate que le crédit documentaire mis en place par la loi de finances complémentaire de 2009 «a pénalisé les entreprises algériennes en les obligeant à payer le fournisseur avant de recevoir les produits achetés, alors qu’auparavant les investisseurs bénéficiaient du crédit fournisseur de 120 jours à la charge du fabricant… Résultat : 80 000 PMI-PME ont disparu du tissu économique algérien.»
Pacte national de croissance économique et sociale : Habib Yousfi dénonce les dépassements consécutifs au non-respect du tripartisme : «Nous pensions être les partenaires du gouvernement et des syndicats de travailleurs.
Nous avons signé ensemble un Pacte déposé par-devant notaire et pourtant les contournements de la méthode adoptée pour appréhender les problèmes économiques et sociaux, c’est-à-dire la concertation, est ignorée.
La rigidité des positions de l’exécutif est préjudiciable à la recherche de solutions ; celles-ci existent, il suffit de se réunir et de les mettre en application. Il faut savoir que, s’agissant du Pacte national de croissance économique et sociale, un comité de suivi est resté, à ce jour, inopérant…»
Habib Yousfi déplore, donc, que la loi de finances 2016 ait choisi l’austérité au lieu de la dynamique du PACTE.
Excès
Il rejette avec force les coups de gueule de ceux qui insultent les opposants au crédit à la consommation : «L’UGTA est une organisation nationale pour laquelle des travailleurs sont morts. J’ai le droit, en démocratie, de critiquer le crédit à la consommation qui endetterait les consommateurs tout en érigeant une concurrence déloyale entre entreprises d’un même secteur.» S’agissant de la LFC 2016, Habib Yousfi soutient que l’austérité qui en est la marque va provoquer le renchérissement des produits de première nécessité, des prix de l’électricité et du gaz, des carburants. Ces augmentations seront répercutées sur le consommateur.
Il déplore la stigmatisation, par le ministre des Finances, des habitudes de consommation des Algériens avant la crise financière en cours et en voie d’aggravation avec un baril à 35 dollars.
Vivre le tripartisme
A une question sur le respect par les entrepreneurs privés du droit du travail, du droit syndical, Habib Yousfi a eu cette réponse : «Nous avons planché pendant des mois avec les partenaires sociaux et le gouvernement sur une adaptation du droit du travail algérien à l’économie «libéralisée». Nous avons un document qui répond aux normes de l’OIT. Je vous pose la question : Pourquoi est-il resté sous le coude, comme on dit ?»
Habib Yousfi demande seulement que les outils mis en place pour anticiper les problèmes, étudier de manière proactive leurs solutions soient réactivés.
O. Larbi
Crédit à la consommation : «Un risque d’endettement sérieux pour le citoyen»
Le président de la CGEA a remis en cause les modalités qui ont été arrêtées par le gouvernement et l’Union générale des travailleurs algériens pour le retour du crédit à la consommation qui, d’après lui, ne remplissent pas les conditions nécessaires.
M. Yousfi qui s’est interrogé sur les critères de choix des entreprises et des produits concernés par les crédits a affirmé que cette disposition comporte un risque d’endettement sérieux pour le citoyen algérien.
D’autre part, l’intervenant a affiché son désaccord avec la proposition du SG de l’UGTA de choisir certains produits aux dépens d’autres, ce qui, a-t-il souligné, est un acte de concurrence déloyale.
Investir dans la ressource humaine
Lors de son intervention, M. Habib Yousfi a plaidé pour l’exploitation de la ressource humaine pour aller vers une nouvelle politique économique créatrice de richesse et d’emploi. L’économiste a souligné que dorénavant il faudra compter uniquement sur les potentialités internes pour tirer la croissance économique vers le haut. Dans ce cadre, le président de la CGEA a appelé les pouvoir publics et le patronat a aider l’élite de jeunes universitaires et de chercheurs, porteurs de projets et d’idées innovantes, qui aujourd’hui ont du mal à trouver des moyens pour financer leurs travaux.
Contre l’ouverture du capital des entreprises publiques
Elaborée par le ministère des Finances pour améliorer la politique économique actuelle et aider le pays à surmonter la crise provoquée par la chute vertigineuse des prix du pétrole, la loi de finances 2016 ne fait pas l’unanimité au sein de la CGEA. Parmi les articles contestés, celui lié à l’ouverture du capital des entreprises publiques. A cet effet, M. Yousfi considère que l’ouverture du capital de ces sociétés, que le gouvernement juge «non productives», risque de les mener vers une chute réelle.
R. R.