La générale de la pièce de théâtre Laylat Chak (Nuit du doute), un huis clos tragi-comique entre des employés et des locataires d’un hôtel sur le point d’être démoli pendant les années de violence terroriste en Algérie, a été faite mercredi soir à Alger.
Produite par le Théâtre national algérien (TNA), cette pièce en arabe dialectal d’une heure, mise en scène par Ahmed Khoudi sur un texte du journaliste et écrivain algérien Arezki Metref, réunit pour une dernière nuit sur leur lieu de travail et de vie six personnages qui vont être embarqués dans une histoire de meurtre après la visite impromptue d’un officier de police.
Dans un décor unique représentant la réception d’un hôtel vétuste, une femme de ménage veuve et mère de sept enfants, un artiste mégalomane reconverti en faussaire, un réceptionniste grincheux, un vendeur de sardines typiquement algérois, un enseignant désespéré d’avoir un logement décent et un creuseur de tombes vont disserter de leurs malheurs respectifs, alors que dehors un climat de «guerre» s’est installé.
Surpris par l’arrivée d’un policier soupçonneux et brutal, ces personnages hauts en couleur vont tuer par inadvertance leur visiteur nocturne, avant de se lancer dans un simulacre de procès pour désigner un coupable, une situation ubuesque qui sert également de prétexte pour dépeindre, non sans ironie, la situation sociopolitique de l’Algérie des années 1990.
Avec des répliques parfois cinglantes et un humour qui jongle entre sarcasmes, burlesque et absurde, le texte d’Arezki Metref, initialement écrit en français au début des années 2000, est bien exploité par une mise en scène qui tire son efficacité dans les déplacements ingénieux des comédiens sur scène et leur capacité à former un groupe homogène.
Cette force du groupe s’est d’ailleurs illustrée dans les nombreuses répliques exécutées en chœur par les comédiens, particulièrement lorsqu’il s’agissait d’allusions à peine voilées à des phénomènes comme la corruption ou le népotisme, une vision critique de la société communiquée au spectateur grâce aux ressorts de l’humour.
Seul bémol de la pièce, sa conclusion jugée abrupte par quelques présents qui auraient souhaité un dénouement moins expéditif (la destruction de l’hôtel), à la hauteur de l’intrigue proposée durant la pièce.
Paru en 2002 en France, le texte initial en français de cette pièce avait été joué en 2003 par des comédiens français et algériens à La Courneuve (banlieue parisienne) sur une mise en scène d’Ahmed Khoudi.