Interview

Rencontre avec le jeune universitaire El Yamine Soum : Le combat de la pluralité

Publié par Propos recueillis par CEM le 09-11-2014, 19h34 | 1076
|

El Yamine Soum, né le 2 août 1979 à Jijel, est un auteur, conférencier et  enseignant. Diplômé de sociologie, de relations internationales et d'études latino-américaines, ses travaux à l'EHESS (Centre d'analyses et d'interventions sociologiques (CADIS)) portent sur les questions internationales et de cohésion sociale. Il a coécrit Discriminer pour mieux régner avec le sociologue Vincent Geisser. Il s'agit d'une enquête sur la  la diversité dans les partis politiques français.  

El Yamine Soum a délivré une série de formations sur la question du bien-être au travail, de la gestion de la diversité et de la parité auprès d'entreprises françaises. Conférencier et acteur associatif, il est particulièrement impliqué dans le débat public en Europe.

El Yamine Soum parle plusieurs langues, notamment l'anglais, l'espagnol et le portugais. Il intervient régulièrement dans les médias internationaux et français tels que (Le Monde, Libération, Le Figaro, France 2, Radio Orient, France 0, LCI, Mediapart, Rue 89, France 24....).

Il est collaborateur auprès du journal brésilien Opera Mundi. En janvier 2012, il publie La France que nous voulons, un ouvrage se proposant d'irriguer de propositions le débat public, avec un regard francoptimiste et jeune sur des thèmes économiques aussi variés que l'industrie, l'agriculture, le développement durable ou encore la question de la dette.

Plusieurs idées de l'ouvrage sont reprises, par des responsables politiques afin de favoriser la création d'emploi et entrepreneuriat. Parallèlement il travaille sur des programmes de coopération économique avec une dizaine de pays (Afrique du Sud,  Vietnam, Turquie, Chili, Mali, Madagascar, Chine, Arménie...) sur les questions de tourisme durable et de préservation du patrimoine et il enseigne le commerce et relations internationales à l'université Sorbonne-nouvelle.

En mai 2013, il publie «Les nouveaux défis de l'éducation», un ouvrage qui donne des pistes d'action en matière de rénovation éducative. Jeune universitaire engagé dans la réflexion, notamment sur les questions de discrimination et de la pluralité en France, El Yamine Soum, fait partie de ces références intellectuelles sollicitées autant par le monde associatif que politique.

Parmi ses nombreuses publications,  un premier ouvrage, «Discriminer pour mieux régner»,  coécrit avec le sociologue Vincent Geisser, en 2008, puis,  en 2012 une autre œuvre «La France que nous voulons», qui pèsera sur l'espace public politique français et verra certaines de ses propositions relayées par des cercles politiques français. Pour DK News, il a accepté de se livrer en tant qu'intellectuel, enseignant et,  surtout animé par une vision optimiste sur l'avenir.

DK News : comment vous présenter à nos lecteurs ?

E.Y.S : né à Jijel, je suis arrivé en France à l'âge de deux ans, avec ma famille revenue s'installer à Tours, dans la région Centre. J'ai poursuivi des études supérieures en sociologie, sciences politiques et relations internationales.

J'ai également eu  à travailler sur le concept de démocratie participative dans le cadre d'un séjour d'études au Brésil. Mon itinéraire socio-familial, ainsi que mes parcours universitaire et professionnel m'ont permis d'aiguiser un sens de la curiosité et de l'observation  des phénomènes liés à la lutte contre les discriminations, aux questions d'éducation et plus largement aux questions internationales.

Y a-t-il un écho à ce combat dans les milieux politiques et médiatiques ?

C'est l'objectif de mon travail au quotidien puisque j'essaie de mettre à profit tous les espaces associatifs, médiatiques ou autres pour  donner de la visibilité à ces questions, avec des propositions concrètes.

J'ai justement un programme assez riche de conférence et rencontres avec ces différents milieux pour assurer la diffusion  de notre façon de voir la vie et de nos attentes sur l'avenir de la société française, qui, à notre sens, ne peut se vivre et se projeter sur l'avenir que plurielle.

Il y a des cercles politiques qui se sont intéressés à nous comme force de débat et de proposition. Mais, je considère que le travail d'explication et de sensibilisation doit être soutenu. Pour les médias, parfois, il y a comme une sorte de schématisation caricaturale, du fait peut-être d'un contexte politique international   marqué par des éléments factuels  aptes à faciliter la stigmatisation au lieu et place du débat et de la réflexion.

Ceci dit,  vous vous revendiquez encore «francoptimiste» ?

Bien évidemment, car cela découle d'une posture d'observateur et  sociologue, qui me permet de m'engager dans une sorte de prophétie autoréalisatrice. A bien analyser les choses, je peux dire, sans risque d'être contredit par beaucoup de monde, que la France est un pays où il fait bon vivre. C'est un pays d'histoire, de culture, d'art et de savoir-vivre.

L'innovation et la création y trouvent un bon terrain d'expression, si l'on juge, par exemple, par le nombre de brevets déposés. Mais, avec tout cela, c'est aussi un pays où la population déprime. Ce que j'ai vu, par exemple au Brésil ou en Algérie, ce sont des populations qui dansent au rythme de chants, chargés  de leurs douleurs et souffrances.

La danse est donc un exutoire autant qu'un levier de communication et de liens sociaux. En France, il me semble que l'on tourne le dos à ces valeurs, à cette dimension, porteuse de bien-être et de bonheur...

Vous vous êtes aussi intéressé à la formation des élites ?

Effectivement, j'ai eu à travailler sur les questions de la rénovation éducative, notamment à la faveur  d'un ouvrage que j'ai publié en 2013, intitulé «Les nouveaux défis de l'éducation».

J'ai constaté qu'au moment où la connaissance et l'éducation constituent des moteurs de développement de par le monde, les territoires de la francophonie se rétrécissent ; en plus de  cela des mesures politiques sont prises – je fais référence particulièrement à la fameuse circulaire Guéant- sans examen des conséquences sur l'appauvrissement du capital cognitif de la France.

Qu'en est-il de la question de la pluralité au niveau des élites intellectuelles et universitaires ?

A ce niveau, il y a un paradoxe : au moment où l'on évoque des pratiques politico-médiatiques  de  stigmatisation, je constate que la percée de  citoyens français issus de l'émigration, n'a jamais été aussi importante, dans la mesure où l'accès au système d'éducation et de formation est largement facilité.

 Je peux dire qu'il y a une pluralité  que l'on peut constater dans les différents paliers du système d'enseignement français. Mais comme le dit souvent ma mère, «quand vous êtes parvenus à ces niveaux, la France ne vous a rien laissé».

Naïvement mais avec beaucoup de sagesse, cette maxime traduit en fait la profondeur  d'une autre crise  que vit la société française : celle d'une économie à repenser. Précisément  la recherche et l'enseignement sont affectés par des difficultés d'ordre économique, ce qui pourrait à terme nuire à notre capacité à inventer, créer, comprendre...

Des projets sur  l'Algérie ?

J'ai participé très sporadiquement à des rencontres en tant que conférencier sur des thématiques de développement socioéconomique. J'ai eu également des contacts pour une réflexion sur le système éducatif. Mais, je vous avoue qu'au fond de moi-même, mon rêve serait de pouvoir travailler dans les domaines du tourisme et du patrimoine culturel et historique.

Je sais que ma région natale est réputée pour son histoire, son patrimoine et ses attributs touristiques, autant d'ailleurs que beaucoup d'autres régions d'Algérie.  J'ai eu à travailler sur les questions de classification et d'inscription de monuments du patrimoine dans certains pays comme le Vietnam ; ce que j'en ai retenu c'est que tant l'histoire que le patrimoine sont toujours traversés par des ressorts politiques.

En ce qui concerne l'Algérie, le patrimoine est impressionnant et à mon sens il serait un levier économique intéressant.  Enfin, je pense que nous manquons cruellement de travaux sur l'Algérie actuelle en sociologie, c'est un terrain en friche dans lequel je souhaite m'investir.
 

Publié dans :
|
Haut de la page

CHRONIQUES

  • Walid B

    Grâce à des efforts inlassablement consentis et à une efficacité fièrement retrouvée, la diplomatie algérienne, sous l’impulsion de celui qui fut son artisan principal, en l’occurrence le président de la République Abdelaziz Bouteflika, occupe aujour

  • Boualem Branki

    La loi de finances 2016 n’est pas austère. Contrairement à ce qui a été pronostiqué par ‘’les experts’’, le dernier Conseil des ministres, présidé par le Président Bouteflika, a adopté en réalité une loi de finances qui prend en compte autant le ress

  • Walid B

    C'est dans le contexte d'un large mouvement de réformes sécuritaires et politiques, lancé en 2011, avec la levée de l'état d'urgence et la mise en chantier de plusieurs lois à portée politique, que ce processus sera couronné prochainement par le proj

  • Boualem Branki

    La solidité des institutions algériennes, la valorisation des acquis sociaux et leur développement, tels ont été les grands messages livrés hier lundi à Bechar par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales Nouredine Bédoui.

  • DK NEWS

    Le gouvernement ne semble pas connaître de répit en cette période estivale. Les ministres sont tous sur le terrain pour préparer la rentrée sociale qui interviendra début septembre prochain.

  • Walid B

    Dans un contexte géopolitique régional et international marqué par des bouleversements de toutes sortes et des défis multiples, la consolidation du front interne s'impose comme unique voie pour faire face à toutes les menaces internes..

  • Walid B

    Après le Sud, le premier ministre Abdelmalek Sellal met le cap sur l'Ouest du pays où il est attendu aujourd'hui dans les wilayas d'Oran et de Mascara pour une visite de travail et d'inspection.