Le massacre de la tribu des Ouffia à El-Harrach (Alger) il y a 188 ans, un des innombrables crimes barbares perpétrés par l’armée coloniale française en Algérie où 1.200 Algériens furent exterminés, est un crime contre l’humanité qui continuera d’entacher d’opprobre et d’infamie l’histoire coloniale de la France.
Les déclarations recueillies par l’APS auprès d’historiens et de chercheurs s’accordent sur l’atrocité et l’horreur du massacre perpétré par l’armée coloniale française contre la tribu des Ouffia à El-Harrach (Alger) le 6 avril 1832, le premier génocide commis par la France coloniale en Algérie après l’invasion sur ordre du sanguinaire duc de Rovigo, et qui constitue un crime contre l’humanité imprescriptible.
Pour l’historien Djamel Yahiaoui, le massacre de la tribu des Ouffia inaugura la terrifiante politique d'extermination menée en Algérie pendant 132 ans par la France coloniale qui croyait qu’en exterminant les hommes, elle pourrait s’emparer plus facilement des terres et des biens.
Cet ignoble crime contre la tribu des Ouffia qui a fait 1.200 m artyrs algériens, n’épargnant ni femmes, ni enfants, ni vieillards, visait à semer la terreur et la peur chez les autres tribus afin de les dissuader de rejoindre la résistance populaire, a-t-il expliqué.
L’historien a précisé que le général en chef le duc de Rovigo, donna l’ordre à ses hommes d’exterminer tous les membres de la tribu des Ouffia, suspectés sans la moindre preuve d’avoir dépouillé les envoyés du collaborateur Ferhat Ben Saïd l’agha des Ziban de présents destinés au duc de Rovigo.
Ce sinistre personnage assoiffé de sang est un des militaires les plus sanguinaires dont les crimes sont légion, a-t-il souligné, ajoutant qu’il avait auparavant (en 1831) ordonné de tuer 4.000 Algériens opposés à sa décision de transformer la mosquée Ketchaoua en centre militaire.
Lorsqu’ils abordent les archives de l’ère coloniale en Algérie, les chercheurs français «veillent, autant que possible, à faire une sélection de manière à occulter les vérités qui condamnent la France pour avoir perpétré des crimes contre l’Humanité et des génocides", a-t-il dit, soulignant que "la vague des troisième et quatrième générations de chercheurs français sont indignés des pratiques sanglantes de leurs aïeux en Algérie dévoilées par les archives, et font, toutefois, passer intelligemment certaines vérités cruell es".
Pour sa part, Dr Yahiaoui a insisté sur l’impératif d’adopter la méthode comparative pour étudier les crimes français et constituer des dossiers de base qui s’appuient sur des témoignages vivants d’officiers et de grands dirigeants militaires », soulignant que "de nombreux crimes contre l’Humanité ont été perpétrés à travers tout le territoire algérien mais n’ont pas été enregistrés".
Les nombreux ouvrages et études publiés récemment par des spécialistes français dans le domaine, à l’instar du livre "Colonier...Exterminer" d’Olivier Le Cour Grandmaison et celui de François Maspero et autres ont démontré les véritables causes du massacre de la tribu des Ouffia, qui dépassent de loin l’affaire de vol de l’Agha des Zibans montée de toutes pièces, a expliqué l’intervenant, révélant qu’il s’agissait de l’affaire de Cheikh El Ouffia qui a laissé passer, via embarcations, des soldats français ayant fui l’Armée française pour avoir refusé de commettre des crimes.
Ayant découvert ce "méfait", l’Armée française s’est vengée de lui cruellement.
Il fut décapité et son crâne envoyé à Paris. Sa tribu a été victime d’un génocide, précise-t-il. Entre autres motifs du génocide de la tribu des Ouffia «le refus de leur Cheikh de traiter avec l’Armée française et d’octroyer ses chevaux et ses animaux en renfort à l’Armée française pour les besoins de ses invasion des autres régions de l’Algérie », selon l’historien.
Dans une déclaration à l'APS, l’historien Mohamed Corso nous confie que le massacre de la tribu des Ouffia était extrêmement brutal et violent contre les Algériens durant les premières années de l’occupation française, la tribu ayant été prise d’assaut à l’aube et ses membres sauvagement égorgés sous prétexte de leur implication dans le vol de présents adressés à l’Agha des Zibans.
L’intervenant a souligné que les dirigeants, les officiers et soldats de France avaient répertorié leurs crimes abjects et le génocide des Algériens, à travers leurs correspondances, rapports et mémoires dans lesquels ils relatent exhaustivement les crimes et les butins de guerre, dénués en cela de toute valeur humaine.
Dr Corso a rapporté, dans ce sens, le témoignage de l’officier Pélissier qui avait participé au génocide de la tribu des Ouffia.
«On tirait sur tout ce qui bougeait n’épargnant ni grands ni petits, ni hommes, ni femmes, ni même enfants, la mort emportait tout sur notre passage», a écrit Pélissier dans son témoignage.
Un autre officier a affirmé que le nombre de morts parmi les membres de la tribu des Ouffia oscillait entre 80 et 100 morts, alors que le butin avoisinait les 2.000 mouto ns, 600 vaches et 30 chameaux.
Le génocide de la tribu des Ouffia a mis à nu une barbarie hors pair du duc de Rovigo qui a ordonné l’exécution du chef de cette tribu sans détenir la moindre preuve que le voleur était membre de la tribu. Il a offert sa tête à un médecin à Paris pour effectuer ses expériences et essais cliniques.
Le massacre des Ouffia aura été le début d’une série de haltes barbares de l’armée coloniale en Algérie, à l’instar des enfumades de la Dahra à Mostaganem et à Laghouat entre autres massacres imprescriptibles qui entacheront d'infmie l’histoire de la France qui prétend, aujourd'hui, prôner les valeurs de la Démocratie.
Pour sa part, le chercheur Ahmed Arezki Ferrad a déclaré à l’APS que le livre de Grandmaison ,«Coloniser...
Exterminer », est une importante référence renfermant en plus des témoignages, des vérités effarantes sur le génocide de la tribu des Ouffia à El Harrach entre autres crimes coloniaux contre l’humanité commis en Algérie.
Il a rappelé que le massacre de la tribu des Ouffia a dévoilé les desseins des autorités françaises qui voulaient exterminer les Algériens comme avaient été exterminés les peaux rouges en Amérique, ajoutant que ce massacre « n’est pas le seule crime commis contre les Algériens, mais plutôt l'un des nombreux crimes commis par le c olonisateur français 132 ans durant, dont les enfumades de la Dahra à Mostaganem en 1844 et le génocide commis contre les membres de la tribu des Aït Menaceur à Cherchell qui étaient contraint de rester sous la neige jusqu’à mourir de froid.
M. Ferrad a affirmé que les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles.
Pour le même intervenant, la plus barbare façon utilisée par l’occupant français pour tuer les dirigeants des résistances populaires était la décapitation, une quarantaine de crânes de ces dirigeants se trouvant au musée de l'Homme en France.
Ils sont allés jusqu'à exhumer les restes d'Algériens pour utiliser les os dans la fabrication de charbon et de sucre, des pratiques barbares et abjectes.
Plusieurs thèses et mémoires universitaires de chercheurs algériens ont traité du massacre de la tribu des Ouffia, mais n'ont malheureusement pas été publiés.