Les essais nucléaires menés par la France coloniale dans le sud du pays restent parmi les pires crimes perpétrés durant 132 ans d'occupation destructrice, dont l'impact sur l'homme et sur l’environnement exige de la France à en assumer la responsabilité. 1960 et 1966, la France a effectué cinquante-sept expérimentations et explosions nucléaires.
Il s'agit de quatre explosions aériennes dans la région de Reggane, treize explosions souterraines à In Ikker, trente-cinq essais complémentaires à Hammoudia, dans la région de Reggane, et cinq expérimentations sur le plutonium dans une zone à In Ikker, située à 30 km de la montagne où ont eu lieu les essais souterrains, selon Dr Ammar Mansouri, chercheur en génie nucléaire.
La première explosion a été réalisée dans la région de Reggane le 13 février 1960, avec une puissance variant entre 60.000 et 70.000 tonnes de T.N.T.
Cette bombe est cinq fois plus puissante que celle lancée sur Hiroshima, selon les experts.
Ces essais constituent une illustration des crimes les plus abjects ayant caractérisé la politique génocidaire pratiquée par le colonisateur que la France officielle doit pleinement assumer et reconnaître.
A cet égard, il est devenu nécessaire de récupérer les archives de la période coloniale, car elles constituent "l'instrument juridique" permettant de définir le nombre exact des victimes de ces essais, comme l'avait souligné l'avocate Fatima Benbraham.
Selon elle, le refus de la France de remettre les archives à l'Algérie et d'ouvrir les dossiers des essais nucléaires est déjà "une preuve incontestable" des crimes perpétrés contre le peuple Algérien en raison de ces essais dont "les plaies demeurent béantes à travers le temps".
La France a voulu effacer "définitivement" les traces de ses crimes, en veillant à emporter avec elle la plupart des archives civiles et celles relatives aux essais nucléaires afin d'"échapper aux sanctions", ce qui a compliqué la définition du nombre exacte des victimes, a expliqué Me Benbraham.
Pour l'avocate, il est temps d'"ouvrir ce dossier épineux" et de demander aux autorités françaises de remettre les archives relatives aux essais nucléaires, et de "jeter la lumière sur ces évènements".
L'historien, Ammar Rakhila, a rappelé, dans le même sillage, "la responsabilité de la France devant le droit international" en raison des préjudices causés aux populations locales, à l'environn ement notamment en ce qui concerne l'équilibre écologique en Algérie.
Il a mis l'accent, notamment, sur la nécessité de contraindre la France par "la force de la loi" à assumer entièrement ses responsabilités, y compris en ce qui concerne les déchets radioactifs et leurs impacts négatifs constants sur l'environnement et la santé de l'homme, en proposant "la création d'une instance chargée de l'élaboration d'un dossier intégré sur ces explosions".
Nécessité de lever le caractère confidentiel des dossiers liés aux essais nucléaires français
Le caractère confidentiel des dossiers afférents aux essais nucléaires français dans le Sahara algérien "permettra de braquer davantage de lumières sur ces dangereuses explosions et élucider leurs effets catastrophiques sur l'environnement et la population", a souligné Dr Mansouri.
Pour lui, il s'agit notamment de permettre aux chercheurs, universitaires et étudiants de s'informer sur ces essais, d'évaluer leurs dégâts et répercussions sur l'environnement, et l'homme.
"Les justifications avancées par la France coloniale sur les modalités de choix de sites de ces essais, admettant que ces endroits ne manifestaient aucun signe de vie humaine, faunistique et floristique, n'est qu'un grand mensonge", a-t-il fait savoir.
Il a mis en exergue, dan s ce contexte, les effets nucléaires dévastateurs polluants et dangereux sur l'environnement, toute en signalant que les rayons radioactifs dangereux ont atteint des régions lointaines de l'Afrique et de l'Europe.
Des émanations radioactives à effets dévastateurs devant perdurer pour des milliers d'année
La France coloniale a mené des essais nucléaires dans des régions sahariennes ouvertes "difficiles à nettoyer des émanations radioactives à effets dévastateurs devant perdurer pour des milliers d'années", a fait observer Kadham El-Abboudi, chercheur en physique nucléaire.
Il a expliqué que les matières radioactives constituent des "polluants des plus dangereux sur l'environnement et le climat car contenant un mélange de produits toxiques mortels produisant des dizaines de produits radioactifs dangereux pour la santé et l’environnement".
Selon le chercheur, ces essais qui avaient atteint leur apogée au terme de quatre essais menés dans une région saharienne ouverte, représentent en puissance "100 fois plus celle des bombes lancées sur Hiroshima et Nagasaki (Japon), et dont les effets directs ont été relevés dans des lieux lointains de la région Sud de l'Europe et l'océan, en plus des averses porteuses de produits radioactifs enregistrées au Sud du Sahara et des nuages ayant atteint d'autres régions de la planète".
Dans le même cadre, le président de l’association "13 février 1960" de Reggane, Omar El-Hamel, a souligné la nécessité de prendre des mesures pratiques pour éliminer la radioactivité nucléaire induite par les essais nucléaires français, dont les répercussions perdurent encore et sont susceptibles d’hypothéquer et mettre en péril, selon les experts et scientifiques, l’avenir des futures générations, fils du pays".
Il a, à ce titre, appelé la partie responsable de cet hécatombe à "hâter" la prise de démarches opérationnelles par le nettoyage de la région des émanations radioactives afin d`y préserver la santé des futures générations, protéger l’environnement en vue d’éradiquer les séquelles que continuent d’endurer l’homme ainsi que la faune et la flore.
L`expert a aussi mis l’accent sur la création de structures médicales spéciales de dépistage des pathologies cancéreuses et de prise en charge des irradiés et malades.