Mostaganem : Témoignages et débat sur le mouvement du théâtre amateur

Publié par DKNews le 27-08-2016, 15h52 | 65

Hadj abdelallah Halfaoui, «un ancien» de la fameuse troupe du GAC (Groupe de l’action culturelle) de Constantine, a évoqué, vendredi , avec une grande nostalgie, sa participation, depuis le début, au festival du théâtre amateur de Mostaganem et toutes les péripéties vécues tout le long de cette manifestation, qui vit cette année sa 49ème édition.

Face à une assistance réduite composée de quelques figures du 4ème art, d’universitaires et de jeunes étudiants et comédiens amateurs, Hadj Abdellah, comme l’appelle affectueusement ses compagnons de route, les yeux pétillants de bonheur, replonge dans le passé pour «feuilleter» ces pages glorieuses du Festival de Mostaganem.

«C’est un Festival qui a été lancé par un homme, le défunt Si Djillali, et soutenu par toute la population de Mostaganem. C’était un évènement de grande solidarité, de bénévolat, de sacrifices. Le théâtre amateur est une grande école d’Hommes», a-t-il soutenu, en prenant part à une table-ronde sur le mouvement du théâtre amateur, organisée, à la maison de la culture Ould Abderrahmane Kaki, dans le cadre de la 49ème édition du FNTA.

Le septuagénaire, à la mémoire encore intacte et vivace, se souvient de ces moments forts en émotions mais également parsemés d’embûches et de sacrifices du fait que le mouvement du théâtre amateur était libre de toute attache et échappait à toutes les formes de contrôle et de musellement.

Presque naturellement, le «sens» donné à cette table-ronde a débordé du cadre purement «commémoratif» pour poser les problèmes actuels que rencontre ce mouvement artistique.

L’universitaire de Constantine, Ahmed Cheniki, grand spécialiste du théâtre algérien, évoque la relation entre le théâtre amateur et l’Université et l’absence de recherches académiques et scientifiques dans ce domaine. Nos universitaires, pour la plupart d’entre-eux, méconnaissent ces expériences et cet héritage universelle», a-t-il déploré, en mettent en exergue le fossé séparant ces deux parties.

Meliani Hadj, pour sa part, a expliqué que le succès du théâtre amateur réside dans le fait, qu’à son apparition et jusqu’aux années 80, les troupes théâtrales étaient fortement politisées. Il a estimé que le public trouvait que ces troupes, avec leur liberté de ton et leurs critiques acerbes de la société, exprimaient bien leurs frustrations, leurs colères et leurs aspirations à un monde meilleur et plus juste.

L’universitaire de Mostaganem, connu pour ses recherches sur les expressions culturelles en Algérie, a indiqué qu’après 1988 et avec l’avènement de la démocratie et du multipartisme, on a vu l’apparition d’un 4ème art «sans discours politique» et l’avènement du «mythe de la scénographie», avec le souci d’un «divertissement coloré».

Les hommes du théâtre se sont rappelé que le 4ème art c’est d’abord et avant tout du texte et du jeu des comédiens.

Hadj Meliani a parlé également de la phase «néo-libérale» avec la création de coopératives et d’autres formes de troupes dont le souci, «trop souvent légitime» a-t-il estimé est de faire des recettes et tirer profit de leurs productions. Mansour Benchehida, également universitaire de Mostaganem, a posé la question de la sauvegarde et la préservation de la mémoire du Festival de Mostaganem.

«Nous avons voulu élaborer un annuaire du Festival, mais on n’a pas pu parvenir à le faire. Il n’existe aucune archive, ni écrite, ni sonore ni iconographique du Festival. Comment voulez-vous que nos étudiants, nos doctorants et nos chercheurs puissent travailler sur ce mouvement artistique», a-t-il déploré.

Le rôle de la presse dans la promotion de la culture, la nécessité d’une relance du mouvement théâtral à la base, dans les écoles, les lycées et même dans les universités, la mise en place d’un cadre juridique pour le FNTA, le financement des troupes théâtrales par les pouvoirs publics ont été autant de questions soulevées par l’assistance.

«Pourquoi les troupes du théâtre amateur, avec leurs moyens limités, drainent toujours le public, chose que font rarement les troupes professionnelles financées par les pouvoirs publics», s’est interrogé le responsable de la troupe mostaganémoise El Ichara.

Une question qui mérite d’être étudiée non seulement par les chercheurs universitaires mais aussi par toutes les parties intervenant dans ce champ artistique.