A quelques semaines de l’Euro 2016 en France : Karim Benzema, une affaire d’Etat

Publié par Cherbal E-M le 28-03-2016, 00h53 | 141

A quelques encablures de l’Euro de football, prévu du 10 juin au 10 juillet en France, ce qui est appelé l’affaire Benzema sort des arcanes des médias et de la justice pour alimenter un débat dans les cercles politiques.

 Tout le monde s’y est mis, avec des jugements souvent défavorables, à Benzema, ce fils d’émigrés, d’un père kabyle originaire de Thighzert, dans la wilaya de Bejaia et d’une mère d’origine oranaise. Parmi les voix qui ont le plus tonné pour demander de «l’exemplarité», celle de Manuel Valls qui a estimé que le retour de Benzema en équipe de France ne devrait pas être envisagé, rejoignant en cela une palette de politiques, dont Sarkozy, le ministre des sports et des députés de droite comme de gauche.

Par un court message sur son compte Twitter, Benzema a répondu à Manuel Valls pour lui rappeler ceci : « Douze saisons que je suis professionnel : 541 matchs joués, zéro carton rouge, onze cartons jaunes !!! Et certains parle [sic] de mon exemplarité ???  ». De son côté, et à peine commis pour défendre la coqueluche du real de Madrid, le célèbre ténor des barreaux français, l’avocat Eric Dupond-Moretti, s’est violemment attaqué aux propos du premier ministre : « Je trouve l’intervention du premier ministre scandaleuse... Je rappelle que, dans son équipe gouvernementale, il y a deux condamnés, Jean-Marc Ayrault [condamné, en 1997, à six mois avec sursis et 30 000 francs d’amende pour favoritisme avant d’être réhabilité en 2007] et Harlem Désir [condamné à dix-huit mois de prison avec sursis et 30 000 francs d’amende pour recel d’abus de biens sociaux en 1998] », a-t-il déclaré dans un entretien avec le journal Le Monde.

Excédé par la tournure prise par cette affaire, le Président Hollande s’est mêlé de l’affaire pour d’abord siffler la fin des interférences. Dans son édition du 23 mars dernier l’hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné a prêté au chef de l’Etat français, cette déclaration, qu’il aurait tenue devant de membres de son équipe gouvernementale : « Maintenant, vous arrêtez vos conneries ». Le propos a été vite démenti par le ministre chargé des sports, même s’il a eu le mérite de calmer les ardeurs et d’apporter de l’eau au moulin des soutiens à un retour de Benzema en équipe de France. C’est que dans les coulisses, le président français apporte un soutien précieux au président de la fédération Française de football. « Mon lien avec le foot français, mon référent, c’est Le Graët », a indiqué Hollande à des invités lors d’un déjeuner organisé à l’Elysée au mois de janvier dernier, rapporte le quotidien Le Monde qui cite une source de la présidence française selon laquelle François Hollande « a confiance en Le Graët et le soutient quelle que soit sa décision. Mais c’est à la fédération de prendre sa décision, pas au gouvernement. Il n’y a pas d’ingérence ». Du coup, la presse française a noté un changement de ton chez les politiques français qui ont vite fait de mettre beaucoup d’eau dans leur vin.

Pour rappel, Noel Le Graët est, avec le sélectionneur Didier Deschamps, discrètement engagé dans un travail en faveur du retour de Benzema en équipe nationale française. Les observateurs de la scène politique française voient dans la position de François Hollande une démarche dictée par deux grandes motivations. D’abord le souci de ne pas gêner Le Graêt considéré comme un soutien indéfectible du chef de l’Etat. Pour rappel, ce dernier a déjà été un élu socialiste. En lui témoignant ce soutien il le conforte dans sa décision qu’il prendra le 15 avril prochain et le libère de toute pression prévisible de membres du staff gouvernemental. D’autre part, Hollande songerait aux retombées politique pour sa côte de popularité, d’un Euro bien négocié par les Bleus, avec une équipe au top niveau, au sein de laquelle l’absence de Benzema est difficilement envisageable.

Quelques instants après le coup de semonce de Hollande, le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, indiquait sur la radio Europe1 : « "J'aime bien Karim Benzema. Je souhaite surtout que l'équipe de France soit très performante, s'il peut y contribuer c'est très bien ». Beaucoup y ont vu une traduction à voix haute de la position de François Hollande.

Cherbal E-M